Riche héritière de nombreux complexes hôteliers, que mon père a bâti à la sueur de son front, j'ai vécu depuis que je suis enfant dans le luxe. Fille unique, je n'ai jamais eu réellement de personne à qui parler. Mes parents étant trop occupés avec leurs hôtels dans chaque recoin du pays, je n'avais que mes nombreuses nounous. Quand j'étais enfant je ne réalisais pas à quel point j'étais gâtée, je pensais que tous les enfants avait la même vie que moi. Et ce dès que mes parents m’inscrivirent dans une école primaire privée. J'ai vu des enfants arriver en limousine, être suivis par des majordomes, tout comme moi. C'est là que j'ai compris que je pouvais tout avoir, tout ce que je voulais. J'étais une gamine capricieuse en y repensant. Mes caprices ont en tout et pour tout duré deux années. Pas que je me sois lassée d'avoir tout ce que je souhaitais, je crois que j'ai vite compris que j'étais avec d'autres enfants privilégiée dans ce monde. C'est quand j'ai vu l'enfant de la cuisinière de la maison que j'ai compris qu'il y avait des gens plus mal lotis que moi. L'enfant que j'étais s'est très vite liée d'amitié avec cette fillette âgée de deux ans de plus que moi. J'ai commencé à rester plus souvent aux cuisines et à parler aux domestiques que l'ont avait plutôt que de faire valoir mon rang auprès d'autres enfants riches à millions. Je n'étais finalement pas faite pour cette vie extravagante. Je ne voulais pas vivre comme mes parents ... bon après ils m'ont forcés à les suivre partout où ils allaient, fêtes et compagnies. Ils m'ont également obligés à suivre des cours de chant et de musique, même si je n'étais pas douée pour tout, j'excellais durant mes leçons de piano. Seul instrument que j'aimais particulièrement. J'avais à peine neuf ans, et je m'ennuyais comme un poisson rouge dans son bocal. L'année de mes douze ans ils ont décidés de mon futur mariage avec un garçon de bonne famille. Ses parents s'entendaient très bien avec les miens, et cela -d'après eux- auraient fait une très bonne publicité pour nos familles respectives ... Toujours question d'argent. J'ai décidé ce jour-là de n'en faire qu'à ma tête.

Treize ans. La première année où j'ai commencé à mettre mes parents à bout. Ils ne savaient plus que faire de moi, engageant une nouvelle nounou pour veiller sur moi - ce qui me faisait à présent trois nounous - et pour céder à mes caprices d'ado. Je ne voyais plus mes parents, ils avaient toujours un prétexte pour ne pas se trouver dans la même pièce, voir la même ville que moi. Je passais donc mon temps dans notre villa de New-York, à discuter avec les personnes qui étaient devenus ma famille, ces gens que mes parents appelaient "domestiques". Je n'arrivais plus à les considérer comme tel, ils m'avaient tout appris, mes nounous m'avaient élevée à la place de mon père et ma mère, la cuisinière m'apprenaient ce qu'elle savait en cuisine, le majordome toujours aussi poli me racontait sa vie et des anecdotes, les femmes de ménages s'occupaient également de me raconter un petit bout de leurs vies. J'avais réussi à nouer des liens avec chacune de ces personnes devenues importantes. J'arrivais à ne plus considérer mes parents que comme des étrangers qui n'avaient besoin de moi que lors de représentations publiques. Je jouais mon rôle et c'était ok, mes parents me laissait tranquille jusqu'à la prochaine fois. J'ai rencontré à plusieurs reprises le jeune homme qui allait me servir de mari. Antipathique à souhait. Je le détestais dès la première minute que j’eus passé seule avec lui. A seize ans, je priais mes parents pour annuler ce futur mariage. Je n'avais pas besoin d'un type qui traitait les gens comme - excusez-moi de l'expression - de la "merde". Il eu le malheur de venir boire le thé en compagnie de ses parents et de traiter ma famille comme des moins que rien. Je ne pouvais pas vivre avec un homme qui n'avait aucune considération pour autrui. Mes parents refusèrent mon choix. Il a fallu que la famille de ce jeune homme fasse banqueroute et n'ai plus un dollar pour que mes parents reconsidèrent leur décision ... Je ne leur pardonnait tout de même pas.

Je n'ai pas versé une seule larme à l'enterrement de ma mère. Pourquoi j'aurais dû pleurer une femme qui n'avait eu que de peu de considération pour sa seule fille ? Malgré tout, elle restait ma mère et ça me faisait mal de me dire que je ne la reverrais jamais mais je supportais la douleur. Plus que mon père. Ce dernier était dévasté. Il avait rencontré ma mère pendant leur adolescence et ils étaient restés ensemble toutes ces années. Ils avaient vécu tant de belles choses et donné la vie à la seule personne qu'il lui restait : moi. Je ne pouvais pas laisser mon père dans un état pareil. Il n'alla plus au travail pendant des semaines, restait enfermé dans sa chambre, ne mangeait presque pas et n'acceptait de voir personne. Je me permis au bout de deux semaines d'aller le voir. Les rideaux étaient tirés, il faisait sombre dans la pièce et mon père se tenait assis, dans son costume d'enterrement, les cheveux en bataille et une barbe naissante, dans le lit qu'il partageait avec ma mère. Aucun mot entre nous. Il ne me congédia pas. J'allais m'installer à côté de lui sur ce lit. Je n'avais jamais vu mon père pleurer, il était resté digne à l'enterrement de ma mère, mais ce jour-là il me brisa le cœur. Il me prit dans ses bras et se mit à pleurer en silence, je ne sentais que les soubresauts qu'il faisait. Je me mis à pleurer à mon tour. Depuis ce jour, j'entretiens une autre relation avec mon père. Nous qui ne nous parlions presque pas, nous étions proches comme une vraie famille ... malheureusement il fallu que ma mère décède.

J'ai réussi à pardonner à mon père de m'avoir délaissé pendant toute ces années. Je l'ai soutenu dans son travail, même s'il continue à rester cupide. On ne refait pas le caractère de quelqu'un en peu de temps. Et lui il me soutient dans tout ce que j'entreprends. Il y a un an de ça, il a décidé de verser des millions de dollar pour aider à rebâtir Glenwood Springs. Cette ville fût partiellement détruite à cause d'une tornade qui dévasta tout sur son passage. A travers mon écran de télévision je ne pouvais pas faire quoique ce soit sauf regarder. Une semaine plus tard mon père passa quelques coups de fils à sa banque demandant un versement pour les organismes d'aides s'occupant de reloger et d'aider les survivants à Glenwood. Je ne pensais pas que mon père était capable de penser aux autres sans aucun profits. J'admirais mon père à ce moment-là. Je me mis à l'aider quand je le pouvais. Il alla passer plusieurs semaines sur place pour aider financièrement. Il dessina les plans des nouveaux logements, et des nouveaux bâtiments administratifs avec d'autres personnes ayant décidés de verser des fonds pour la ville. Il mettait du cœur à l'ouvrage. J'étais fière de ce qu'il faisait pour les habitants de Glenwood. Je le rejoignis quelques temps après, voulant suivre de plus près ce qu'il faisait. On se disputa. Il avait réussi à faire construire un énième complexe hôtelier. Il me raconta que c'était pour relancer l'économie locale, créer de l'emploi et relancer le tourisme dans la ville. Je pensais surtout que c'était pour son bénéfice à lui. Il a engagé des personnes du bâtiments pour faire reconstruire ce Resort, bien payés, et avec des jours de congés. J'étais plus que surprise, mais cela ne changeait pas mon avis sur le but et l'argent que cela lui rapporterait. Racheter le Glenwood Hot Springs Resort et le faire reconstruire allait lui créer un sacré bénéfice ! Je n'étais certainement pas pour la manière dont il s'était prit pour avoir "main basse" sur le rachat du Resort, mais si avec ça il créait des emplois je ne pouvais être qu'à moitié d'accord avec lui ...  Je décidais de rester vivre à Glenwood avec mon père. Je travaille en tant que pianiste au restaurant du Resort. Je n'aime pas les regards que certains employés me lancent, moi la fille qui a été "pistonnée" par son père puisque ce dernier a racheté le Resort. C'est surtout moi qui me suis battue avec mon père pour occuper ce job. Jamais il ne m'aurait laissée travailler pour lui. Ou même travailler chez ses concurrents ! Au contraire, il aspire à ce que je suive ses traces et dirige à mon tour tous ses hôtels et complexes. Je ne veux justement pas de cette vie. Je rêve de quelque chose de plus simple. Même si ce n'est pas bien partit tant que je vivrais avec mon père. Il a d'ailleurs décidé de vivre dans une villa du côté de Loveland Lane, il a toujours eu le chic pour trouver la villa qui lui correspondait et ce même si ma mère ou moi on ne se sentait pas chez nous. La villa est très peu remplie de meubles, l'ambiance qui y règne est très froide, on ne se sent pas à l'aise que ça soit dans n'importe quelle pièce de la bâtisse. Je passe donc le plus clair de mon temps à fuir et travailler au restaurant du Glenwood Hot Springs Resort.