J’ouvre les yeux. La lumière est trop forte et m’aveugle. J’ai du mal à voir ce qui se passe autour de moi. J’abaisse légèrement les paupières, et parvient à distinguer, à travers la fine fente que forme mes cils, deux silhouettes. Deux hommes. Grands. Ou alors peut-être ne le sont-ils pas. Après tout, je suis allongé sur un lit, tout me parait grand vu dans bas. Tout me paraît effrayant. Je ravale ma salive bruyamment, entrainant avec le gout du sang qui s’écoule de je ne sais où. C’est à peine à ce moment-là que je me rends compte que la situation n’a rien de normale. Je ne connais pas les lieux, je ne connais pas ces mecs, et j’ai honte de l’avouer, mais j’ai mal. Mal au point d’avoir envie de chialer comme une femme. Mais je me retiens. Je sers les dents, referme mon poing et alors que mes yeux se sont peu à peu habitués à cette lumière vive, je les défis du regard. Mes phalanges craquent sous la force de mon poing, et je me rends alors compte que mon petit doigt est légèrement tordu. Je grimace. Je suis mort de trouille. A la limite de l’évanouissement. J’ai envie de gerber. Je pourrais bien gerber à leurs pieds, maintenant, tout de suite. Mais je ravale le liquide acide qui s’est emparé de ma gorge avec dégout. Je ne sais pas ce que je fais là. J’ai beau cherché je n’arrive pas à me souvenir comment j’ai atterri ici. Et ça me met en colère. Si la douleur et la faiblesse ne m’avaient pas cloué à cette chaise, je me serais probablement levé avec fureur, retournant toute la pièce sur mon passage. Mais j’en suis incapable. Mes yeux partent dans tous les sens, cherchent une échappatoire, mais j’ai tant de mal à me concentrer, à fixer un point bien précis. C’est comme se réveiller avec une bonne gueule de bois en pire, beaucoup plus pire. « Il est réveillé. » Je tourne automatiquement la tête vers la voix qui vient de parler. Je mets du temps à analyser le sens que prennent ces mots, et finalement, tout me reviens.  La tornade, les cris, les larmes, les gémissements de douleur. Ladite tornade avait été violente, elle avait tout emporté à son passage. Les sols s'étaient mis à trembler comme les murs s'ébranlèrent, sournois et trop lourds, c'était tout mon monde insouciant qui s'écroulait avec moi. Ce souvenir m’arracha un gémissement de douleur avant que mon esprit s’évade et que je sombre dans un sommeil.  

En un an ma vie avait complétement changé. J'avais arrêté les études pour bosser en tant que barman pour pouvoir aider ma mère. La tornade ne l'avait pas épargné. Une poutre de la maison lui était tombée dessus lui brisant au passage un nerf sur le pied, un an après cet accident sordide elle est dans l'obligation d'utiliser une canne pour marcher. Les frais d'hôpitaux, de kiné et les soins qu'elle avait du avoir nous avait ruiné et elle était incapable de reprendre le boulot. Ici est l’Amérique. J'avais donc tout lâché pour prendre soin d'elle comme elle avait pris soin de moi. Face à toutes ses difficultés, la femme que j'avais aimé, plus que tout, avait décidé de me quitter. Sans aucune raison. Je ne savais pas qu'on pouvait aimer à ce point. Enfin, moi en tout cas, je croyais que je n'étais pas programmé pour aimer de cette façon. Les déclarations, les insomnies, les ravages de la passion, c'était bon pour les autres tout ça. D'ailleurs, le seul mot de passion me faisait ricaner. Et pourtant je l'avais aimé et puis ... je l'ai perdu. Elle m'avait lâché sans aucune once de remord. Je l'avais aimé pendant 3 ans. Et j’avais pensé que cet amour était réciproque. Heureusement, Théo est là. Entre les soirées boites de nuits, boites de stripteases ... Il a tout essayé pour me la faire oublier et que je tourne la page. Mais son prénom vient me hanter quelques nuits : Juliett. Et inconsciemment, je m'étais rapproché de Liz, la petite soeur de Théo, la fouineuse qui aimait nous faire chier mais qu'on lui rendait si bien. Je l'avais toujours considéré comme une gamine, celle qui nous déranger lors de nos soirées rien qu'en étant dans les parages. Bref une parasite. Mais lorsque j'avais eu besoin de quelqu'un elle était là, elle avait su m'écouter et puis les choses ont fini par déraper. Elle avait finit dans mon lit.